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Comment peuvent-ils faire, alors, pour devenir une vraie force politique ?
Le veulent-ils vraiment ? En dehors de la question de la justice sociale, les Gilets jaunes ont surtout défendu l’idée d’une démocratie directe, avec par exemple le référendum d’initiative citoyenne. Mais la démocratie directe c’est une méthode, pas une orientation idéologique. Ce qui fait douter de la capacité des Gilets Jaunes à devenir un mouvement politique, c’est son aversion pour les corps intermédiaires. Or, le PGJ, l’éventuel Parti des Gilets Jaunes, serait un corps intermédiaire ! Une machine à transformer l’énergie de la révolte, qui détruit, en énergie de proposition qui construit. Pour cela (et même avec une organisation la plus démocratique possible), il faut pouvoir et vouloir élire des représentants. Pour l’instant, ils en sont incapables. Mais sans délégation, c’est-à-dire si l’on n’est pas capable d’inscrire son intérêt propre dans un intérêt global, pas de causes communes envisageables, pas de démocratie possible... C’est alors l’emporte-pièce en guise d’argument, la somme des colères particulières qui ne peuvent s’unir que contre un bouc émissaire qui ne tardera pas à être désigné. Les gilets jaunes sont à ce moment de leur très courte histoire. Soit ils se réunissent, autrement que sur les forums du net et sur les ronds-points devenus de chaleureux refuges... et ils tentent d’avoir une vision d’un avenir souhaitable à proposer (mais ça prend du temps), soit ils persistent à revendiquer, en ordre dispersé et sans confiance en personne. Ils seront alors, comme leurs cousins Italiens des 5 étoiles, le marchepied d’une proposition autoritaire prétendument populaire : Marine Le Pen (qui saura en temps utile proposer les bons boucs-émissaire) pour devenir la seule opposition de poids... et donc la seule alternative.
L'équipe
Thomas Legrand Editorialiste politique à France Inter
Mots-clés : Politique